Je me souviens
Je me souviens
D'un revers de la main, j'essuie furtivement une larme qui, nichée au bord de l’œil, hésite à se hasarder sur ma joue.
Je me souviens de tout. Je me souviens de vous.
Vous êtes le socle de ma famille, les piliers fondateurs de mon existence. Sans vous je ne serais pas et grâce à vous je suis ce que je suis devenu.
Je vois encore vos regards remplis d'amour, je sens vos mains de travailleuses et 'hommes de labeur se poser sur ma tête et me caresser les cheveux avec d'infinies douceurs. J'entends encore vos encouragements et vos conseils pleins de bon sens.
Je me souviens de tout. De ces grandes tablées qui faisaient le ciment de notre famille où tous avions notre place, petits et grands. L'amour familial était là, immense et beau.
Je me souviens de chacun de vous, je me rappelle tellement de bons moments, peut-être étaient-ils insignifiants à vos yeux d'adultes mais tellement importants pour l'enfant que j'étais. Je me souviens de ces longues parties de pêche, le long du canal où grand-père tu passais plus de temps à démêler mon fil qu'à t’adonner à ton loisir préféré.
Je me souviens de l'herbe que nous allions couper pour nourrir les lapins, je me souviens aussi parce qu'il fallait bien se nourrir avoir appris à tuer et à dépecer le lapin.
Je me souviens de ces goûters extraordinaires où une simple tartine de saindoux juste salée et poivrée faisait mon bonheur avec cet oignon vert que je croquais à pleines dents et qui me donnait une haleine à faire tomber les mouches en plein vol et ces tartines garnies de fromage que tu faisais gratiner au four, un régal que j'ai transmis à mes petits.
Je me souviens de tout. De ces grandes marmites de pâte à gaufre ou à crêpe que grand-mère faisait cuire lors des réunions de famille, tout le dimanche après-midi et que, cousins et cousines engouffrions avec un vorace appétit.
Oui, je me souviens et souvent la nuit, avant de m'endormir je pense à chacun d'entre-vous. Vous êtes partis bien trop tôt. Certains ne m'ont connus qu'adolescent, d'autres dans mes premières années d'adulte mais tous vous avez posé votre pierre à mon édifice, vous avez consolidé et parfois redressé ses fondations. Vous m'avez transmis vos valeurs humaines et votre amour immense.
Je sais que vous êtes ici. Quelque part. Vos photos sont dans ma maison mais surtout vous vivez dans mon cœur et dans ma mémoire. Je revois vos visages toujours souriants et heureux. Heureux comme l'a été votre vie à travers mes yeux d'enfant. Vous me donniez cette impression de couples si solides. Je me souviens de chacun de vous ; Gilbert, Madeleine, Paul, Léon, Renée, Michel, Roger et Irène.
C'est avec vos disparitions que j'ai appris la mort et cette douleur silencieuse qui nous hante pour toujours. Ainsi, vous n'étiez pas immortels, vous mes guides, mes modèles auprès de qui je trouvais un havre de paix en me réfugiant dans vos bras grands ouverts. Avec vos disparitions j'ai mis un pied dans le monde des adultes et regardé différement la pendule de la vie et son inéluctable échéance à laquelle nul n'échappe.
Je me souviens de vous et vous êtes encore tellement présents. Je vous aime mes chers disparus et alors que mon horizon commence doucement à s'obscurcir, vous serez mes
anges gardiens pour m'aider lorsque le moment sera venu, dans ces moments difficiles que traverse chaque homme.
Une larme coule le long de ma joue....